Lit Lee Ly Livraison

Alors on avait besoin d’un lit pour accueillir nos copines du Pays de Gex. Alors on a commandé sur Jumia. Jumia c’est l’équivalent d’amazone mais pour l’Afrique. Donc on paye à la livraison. Alors on a aussi commandé une moustiquaire, un canapé et un rangement pour les chaussures.

Et rien que la livraison c’est une aventure. La notion de « demain » est assez floue et donc quand tu reçois le mail qui te dit que le colis arrive, et que tu appelles pour dire au livreur que « demain » mercredi on ne sera pas là, et qu’il faudra livrer après demain, le fait de ne pas tomber sur le livreur au téléphone mais une personne qui semble à peine au courant n’a absolument rien de rassurant. Le message semble tout de même être passé.

C’est donc le jeudi que j’ai un coup de fil du livreur qui me demande où on habite car il est en route. Les indications plus ou moins habituelles et voila l’équipe de livraison dans leur brillant camion bleu et orange. Lorsque nous avions commandé chez Discover l’équipe avait pris le temps de monter les meubles et je m’attendais à un service équivalent. Né-ni. « Et juste monter les 3 cartons ? » genre y’a que 2 étages ça va pas vous luxer le genou … « de toute façon les sous sont en haut » … ha ! l’appel de l’argent. On y reviendra.

« Non mais on est pressés après on a encore pleins de livraisons à faire » me dit le livreur chef en brandissant une liste de cinq objets dont trois cochés (les notre j’imagine).
Si t’avais pris mon emplacement GPS avant de partir t’aurais pas perdu une demi heure dans la rue à tourner, pense-je. Mais comme ils semblent sur des charbons ardents, je ne prends pas le temps d’ouvrir les cartons. Le compte d’objet correspond (sauf le canapé qui a été annulé à cause d’une volonté sub-divine indéterminée). Et je n’ai pas trop le choix que d’avoir confiance. On y reviendra.

La quantité excessive de scotch jumia sur le carton et le redécoupage du carton qui emballe les pièces du lit aurait du me mettre la puce à l’oreille. Au moment du déballage, on s’y met à deux et on prévoit une bonne soirée parce que bon c’est un lit quand même. Comme pour un meuble ikea il y a une notice avec la liste des différentes pièces nécessaires au montage. Inutile de dépeindre la scène, on l’a tous fait :
« 2 grilles en métal » … « -check! »
« 4 tubes en métal avec un bitogno » … « -check »
« 2 barres en bois avec des trous dans l’autre sens »… « -check! »
« 8 vis et 4 vis plus grosses que les autres vis » … « … »
 » des vis ?  » … « … »
« … » … « t’as regardé dans l’intérieur du carton si elles sont pas scotchées ? »
« non pas de vis cachée… »

Alors tant pis pour le montage du lit ce soir… Et on appelle le service après vente Jumia dès le lendemain. Et … oui Céline est madame Lucas. J’ai abandonné l’idée de faire prononcer correctement mon nom de famille ici dans le même élan que j’ai laissé tomber l’idée de faire comprendre le pacs. Ah mais madame Lucas il fallait vérifier à la livraison, maintenant on peut rien faire. – on ne reviendra donc pas sur la confiance finalement – Après avoir insisté, doublé les coups de fils, et un raccrochage plus ou moins tempestif de leur côté, nous obtenons le numéro de leur fournisseur du lit. Qu’il faut appeler pour nous fournir les vis manquantes. C’est lui qui s’en occupe. Son nom c’est monsieur Ly … Ça s’invente pas.

Alors on a appelé monsieur Lee. Qui est en mode chouine parce que ils font apparemment le coup régulièrement et lui il a livré un lit complet avec les vis et il fallait vérifier avant vu que lui, de toute façon il a livré avec les vis et c’est à Jumia de se débrouiller parce que lui il a tout livré y compris les vis. Ok, mais moi j’ai juste besoin des vis. Bon comme il est sympa il peut me filer les vis mais il faut venir les chercher. Quartier Castor. Alors pour ceux qui n’ont pas encore mis maps.google.sn dans leurs favoris on parle de traverser environ la moitié de la ville. Alternativement il me donne le numéro d’un gars qui pourrait nous emmener les vis… pour la modique somme de 5000 CFCA. ha ! l’appel de l’argent on y revient.

Ce n’est pas tant la somme, que l’idée d’avoir ‘encore’ un livreur à téléguider jusqu’à chez nous qui me pousse à lancer l’opération « visser Willy ». Le plan s’articule autour de deux parties. D’abord je remonte la rue des mamelles et je fais les quincaillers en utilisant la notice pour trouver le jeu de vis manquantes. Si cette première partie échoue je rappelle monsieur Lit et j’irais à Cité Castor histoire d’optimiser les chances d’avoir les vis.

Premier quincailler, plutôt sympa. Il pose même ses écouteurs pour fouiller dans ses boites de vis, mais sans succès.

Deuxième quincailler, ne daigne pas raccrocher son téléphone pour les clients, et le lit derrière son comptoir est plus important en volume donc j’imagine en intérêt que son stock ou que ses clients. si jamais tu voulais pas bosser fallait peut être pas ouvrir une quincaillerie…

Troisième quincailler, peu avenant et ne parlant que wolof, il semble avoir son traducteur dédié. Je n’ai même pas le temps de lui montrer quel objet il manque sur ma feuille qu’il me dit déjà que non il n’en a pas. J’insiste un peu mais non.

Alors j’ai enchainé sur le plan B. Un rapide coup de fil à monsieur Li pour avoir l’emplacement exact et me voici dans un taxi. On a déjà parlé des taxis, celui-ci ne déroge pas. Il fait même ce que l’on pourrait définir comme des triangles amoureux routiers. Il force un peu et se retrouve bloqué par une voiture grise, mais elle ne peut pas avancer car elle est bloqué par une voiture bleue qui est elle même bloquée par le taxi… bien joué.

C’est après un passage au feu complètement non conventionnel et proprement klaxonné que l’on arrive dans la zone concernée. Inutile de dire que la rue D13 n’est pas présente sur mon plan donc je dis au taxi de me poser et je finirais bien par trouver le bon endroit en faisant à pied des cercles de plus en plus grand dans le quartier. Mais c’est sans compter sur ma chance insolente. En effet à peine posé le pied hors du taxi et les yeux levés que je vois pile poil en face l’enseigne « biolife style » qui correspond au magasin dont monsieur Lis m’a parlé. Enfin un truc qui marche du premier coup.

Alors je suis rentré dans le magasin. Et quand je disais que Jumia c’est l’équivalent de amazon pour l’Afrique, toute l’étendue de l’expression se dévoile. On a tous vu les images des robots amazon qui font les paquets tout automatique et tout dans des rangées bien rangées. Ici aussi les piles d’objets emballées ne laissent que peu de place à l’opérateur. Des piles d’armoires en tissus dans leurs cartons, des thermos, divers ustensiles de cuisine accrochés de part et d’autres, quelques chaises presque emballées. Le tout bardé de scotch Jumia, de papier bulle et de cartons.

Dans cet « entrepot » deux personnes.
Un garçon qui s’affaire et semble plutôt surchargé. Il reçoit un nouveau carton transporté à l’arrière d’une mobilette, et en même temps me demande ce que je veux et en même temps appel, et en même temps semble faire un inventaire.
Et une fille qui fait rien du tout. Ah si, elle regarde son portable et scroll sur youtube. A la recherche de la Vérité j’imagine.

Le garçon me dit de m’assoir sur la chaise partiellement emballée, et me dit de patienter. Ce que je fais sans trop de scrupule pour la personne qui recevra la chaise vu qu’elle semble déja avoir été utilisée de toute façon. Pour patienter j’imagine à quel point il serait facile de subtiliser des objets ici tant tout est serré et accessible. C’est au moment ou je mettais en balance ma fade carrière d’informaticien contre l’opportunité alléchante de vendre des objets dans la rue en passant entre les voitures, que le garçon me dit que voici les vis. Et en effet un sachet rouge plein de vis est apparu sur la chaise juste à coté de moi. Dans le capharnaüm ambiant j’ai du mal à savoir exactement à quel moment il est apparu, mais il est bien là. Et à l’intérieur il y a des vis. Beaucoup, et la clef allène correspondante.

Alors comme je suis trop gentil, j’ai encore fait confiance – on y revient encore – . Mais bon en même temps l’alternative c’était de m’assoir par terre et vérifier les vis une par une en mode « bac à Lego ». Je vais pour partir mais le garçon me dit que non, il faut les payer. Et je lui dis que non, j’ai déjà vu avec monsieur Lhi. Il l’appelle donc de nouveau et j’en profite pour voir l’orthographe correct sur l’écran de son téléphone et c’est Monsieur « Ly » en fait.

Alors est-ce que j’ai besoin de dire que les vis ne correspondaient que partiellement ? oui ?… bon ben voila, il manquait tout de même 4 grosses vis indispensables car elles tiennent les deux moitiés du lit solidaires, et on a une quinzaine de petites vis noires surnuméraires inutiles.
Donc on a fouillé notre boite à rabiot et on a fini par trouver de quoi fixer les deux moitiés. Mais seulement 2 grosses vis avec les boulons corrects. Je refais donc la tournée des quincaillers, mais avec cette fois le modèle exact de vis dans la main. Encore deux fois c’est un échec. J’insiste encore chez le troisième qui s’est empressé de me dire qu’il en avait pas alors qu’il n’avait même pas regardé la vis en question. (à croire qu’ils ont leur stock complet en bas de donnée dans leur tête à la vis prêt). Mais tout de même il finit par aller chercher et par trouver une vis similaire et même les boulons qui vont avec … ouéh ! pour 500 CFCA ooh ! l’appel de l’argent… c’est vrai que c’était un effort surhumain. Pas de négociation possible c’est le prix pissétou.

Mais on a quand même pu finir de fixer le lit. Même si les vis achetées sont un tout petit peu plus courtes que ce qu’il faudrait, ça tient et on a testé. Note pour Liselotte et Sylvie, si jamais vous tombez en pleine nuit, on ira directement voir monsieur Ly pour le gronder.



Une réflexion sur « Lit Lee Ly Livraison »

  1. Alors comment dire… ? Je suis partagée entre mon fou rire, digne d’une comédie de Louis de Funès tellement les scènes paraissent surréalistes, et la culpabilité à l’idée de vous avoir fait subir toutes ces épreuves… Comment on va pouvoir vous remercier de tout ça ? Déjà, j’ai moi même une boite à vis bien remplie : avec une photo je peux peut-être en trouver des compatibles ? Sait-on jamais ? Et du coup je pourrais peut-être envisager de me recycler en quincaillère au Sénégal pour ma reconversion (je suis moins ambitieuse que Lucas ce coup là 😉 (en même temps ce qui m’épate c’est que vous ayez réussi à trouver trois quincailleries « opérationnelles »)
    En tout cas bravo pour vos talents dignes de Mac Gyver !

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